2 septembre 2022
Il a fait chaud et le canapé ayant tendance à s’enfoncer n’était pas très confortable. Je suis malgré tout bien reposé dans ce lieu calme. Je me lève et me trouve enfermé à l’intérieur. Je sortirais bien récupérer mon ordinateur, encore dans mes sacoches sur le vélo, pour me mettre à écrire. Je procède à des exercices de respiration qui se terminent juste au moment où Dani se lève. Il m’ouvre alors, ce qui me permet de récupérer mes affaires.
Je passe le reste de la matinée à écrire jusqu’à ce que Dani me demande si je veux manger avec lui. Il prépare une tortilla excellente que nous partageons autour du bar. J’apprends alors son prénom, qu’il est croate et qu’il a beaucoup voyagé à pied et en stop. Il me dit qu’il adore marcher et qu’il lui est arrivé un jour de marcher jusqu’à 70km dans la journée. Il me dit qu’il a aussi parcouru l’Amérique du Sud, dont une bonne partie sans papier : arrivé en Equateur, comme un refrain qui se répète (voir article Collioure), il se fait dépouiller de toute ses affaires, dont son passeport. Il me dit qu’ensuite il était libre d’aller et venir où bon lui semblait. Il ne parlait alors pas espagnol et me raconte qu’un jour la police, en Colombie me semble-t-il, l’arrête, n’ayant pas de papier et ne parlant pas la langue, finit par le laisser partir ne pouvant alors rien faire contre lui. C’est un homme intéressant et étonnant, il paraît souvent ailleurs et ne prête pas toujours attention à ce qu’on lui dit. Je tente de l’aider avec des démarches administrative avec sa banque en ligne qu’il ne comprend pas suite à la perte récente de sa carte bancaire.
Je continue à écrire une bonne partie de l’après-midi, jusqu’à ce que je me décide à me promener sur la plage. Je marche un moment sur la plage puis fait un aller-retour, comme souvent ailleurs, jusqu’à la bouée des 200m avant de continuer ma promenade sur la plage. Je m’arrête dans une supérette acheter du pain que m’a demandé Dani ainsi que des chips, pour un apéro potentiel, un morceau de fromage et du chorizo pour me préparer un sandwich pour le lendemain. En continuant mon tour je repère un endroit où je pourrais boire une horchata le lendemain : je viens tout juste de consommer une boisson glacée.
Je rentre à la Mezquita que je trouve animée par la visite de la copine de Dani. Je continue un moment à écrire, puis sors les aliments que j’imaginais partager avec les visiteurs de la Mezquita. Je retrouve Jake qui arrive plus tard et retrouve des amis, un couple vivant dans la région d’Alméria. J’apprendrai ce soir là le fonctionnement du lieu dont j’avais déjà une vague idée. La vente de cannabis est illégale en Espagne ; cependant, sous couvert de l’adhésion à un club, il est possible de le vendre tant que l’on accepte le règlement et que celui-ci est consommé à l’intérieur de l’établissement. La structure se protège ainsi : si quelqu’un achète du cannabis et le consomme à l’extérieur, alors il est en tort puisqu’il déroge au règlement du club.
Les amis de Jake me conseillent de passer par le village de las Negras si je passe par le parc régional de Cabo de Gata. Dani part plus tôt et ne dort pas à la Mezquita ce soir, il me dit qu’il reviendra le lendemain aux alentours de 10h pour que je puisse partir. Je passe la fin de soirée à écouter Jake et ses amis discuter. Jake me montre une chambre où je pourrai m’installer pour la nuit plus confortablement que sur le canapé, puis je lui demande ce que je dois pour mon séjour à la Mezquita. Il me dit que je ne dois rien du tout et qu’il est content qu’ils aient pu m’aider de la sorte.
3 septembre 2022
Je range mes affaires le temps que Dani arrive peu avant 11h. Il s’excuse de son retard. Je profite une dernière fois d’internet pour régler quelques détails puis salue Dani en le remerciant bien et de la même manière il me dit qu’il est heureux d’avoir pu m’aider dans mon voyage. Je décide pour aujourd’hui de viser Guardarmar où Dani est resté un long moment, notamment pendant la pandémie. Je m’arrête à 13h à Alicante que je sillonne vaguement à vélo à la recherche d’un marchand de nourriture, et plus particulièrement paella, à emporter. Je découvre ainsi plusieurs places ombragées par d’immenses ficus, plongeant leurs racines aériennes dans le sol se transformant ainsi en pilier pour soutenir leurs branches traçantes.

Alors que je suis arrêté à me poser la question sur l’endroit où me sustenter, un cycliste m’interpelle en me disant qu’il lui arrive de voyager un peu et que mon vélo est chouette. Je lui demande alors conseil et il m’indique un endroit d’où je repars avec une portion de « fideau » et de riz au lait que je mange sur une place non loin de là.
Je me remets en route en direction de Guardamar. J’arrive rapidement à la jolie pointe de Santa Pola que je longe observant au loin l’île de Tabarca. Je marque un arrêt au niveau des salines où j’aperçois une montagne de sel, alimentée par un tapis roulant se déplaçant petit à petit. Je pousse jusqu’à Guardamar que je rejoins finalement assez vite, n’ayant pas ou peu de dénivelé sur ma route. Je décide de changer d’objectif et de changer de région en rejoignant Murcia. J’ai encore beaucoup de kilomètres à parcourir mais le temps nuageux me permet d’obtenir de bonnes conditions pour avancer.

A quelques kilomètres de l’état de Murcia, je m’arrête dans une cabane le long de la plage animée par un chanteur accompagné par des instrumentales qu’il passe sur sa sono. Il est plutôt doué et me pointe du doigt sur un « please to meet you », parole de Sympathy For The Devil des Rolling Stones, alors que je m’approche avec mon vélo. Je m’arrête ainsi pour l’écouter autour d’un virgin moijto. Sa prestation est bientôt terminée, je l’écoute donc jusqu’au bout. Au moment de repartir j’échange quelques mots avec lui en anglais puisqu’il ne semble pas parler espagnol. Il est alors amusé d’être un événement aléatoire de mon quotidien mouvementé. Je n’ai plus qu’une dizaine de kilomètres à parcourir pour passer dans la région de Murcia. J’arrive victorieux à la plage Mojon de San Pedro del Pinatar juste pour le coucher du soleil. Elle me semble calme et un bon endroit pour passer la nuit. Je décide alors de m’arrêter à un chiringuito, cabane en bord de plage, pour me rafraîchir et manger le sandwich qu’il me reste.
Je me dirige vers mon vélo pour le déplacer vers la table où je compte m’installer quand un couple m’interroge sur la curieuse machine et le voyage. Ils ont l’air sympathiques, alors je leur demande si je peux m’installer avec eux pour consommer ce que j’ai commandé. Je passe un super moment avec eux, ils sont aussi venus à vélo mais de bien moins loin. La femme reçoit un appel de son fils d’une bonne dizaine d’années qu’elle me passe puisqu’il ne croit pas que sa mère puisse être assise avec moi. L’enfant me demande alors immédiatement, mais quel âge avez-vous donc, Monsieur ? Le couple me demande de quoi je vis, ce qu’en pensent mes parents et ce que je pense faire après. Je leur réponds alors que j’ai le temps et qu’après je deviendrai probablement boulanger. Le temps se couvre un peu mais n’annonce pas de pluie courant de la nuit mais éventuellement de petites averses avant 22h. Ils décident donc de partir et m’offrent ce que j’ai commandé au chiringuito. Je les remercie bien et offre une preuve en image de notre rencontre à la femme pour son fils.
Je reste encore installé un moment au chiringuito devant l’ordinateur puis finis par m’installer sur la plage qu’une des serveuses, manifestement française, me confirme comme étant tranquille. Je pourrais cependant être dérangé par une ronde de police à la recherche d’éventuels débarquements de migrant qui peuvent survenir dans la région. Cela me ramène à cette dure réalité que j’avais en tête avant de partir et que je commence maintenant à toucher du doigt, même si en réalité je l’observe depuis mon entrée en Espagne à chaque fois que je croise des vendeurs ambulants qui sont tous Africains.