18 juillet 2022,
Je me réveille d’une bonne nuit en hamac. Il est 7h, il fait encore frais, je m’habille de vêtements chauds le temps de déjeuner et rassembler mes affaires. Je rejoins la petite cascade en bord de route et profite d’un moment pour effectuer quelques mouvements de yoga pour finir de me réveiller avant de me mettre en route. Cela me fait du bien, je n’ai pas eu l’occasion de bouger ainsi depuis que je suis parti.

J’atteins rapidement Buis-les-Baronnies. Je demande mon chemin à un cycliste en VTT qui m’indique comment me rendre au pied du Ventoux. A l’approche de 8h, il me dit qu’il est peut-être déjà un peu tard pour le tenter. Je suis ses indications et me retrouve rapidement à Malaucène après avoir ajouté le col des Voltigeurs à la liste des « trophées ». Je prépare mon ascension par un rechargement en eau agrémentée d’antésite, de crème solaire et de victuailles d’une petite boulangerie.
Je me lance, il doit être 9h30, je prends la route qui mène au Ventoux. En sortie de Malaucène je glane de nombreuses mirabelles sur un arbre en bord de clôture d’une maison qui semble abandonnée ou du moins non entretenue. J’arrive au panneau qui indique le profil : une vingtaine de kilomètres pour un dénivelé moyen de 7 ou 8 %. J’avance lentement mais sur les premiers kilomètres. Je me donne pour mission de collecter une partie des déchets qui jonchent le bord de la route. Je me fais doubler par des vélos électriques ou des cyclistes en vélos route assez légers. Au détour d’un virage, je finis par rattraper Thierry, un cycliste en vélo de route qui fait une pause. Avec mes arrêts relativement fréquents pour collecter des déchets nous finissons par jouer au chat et à la souris : je le dépasse, il me rattrape, et inversement. Je finis par lui offrir quelques mirabelles qu’il accepte de bon cœur.
La route est globalement assez propre par rapport à certaines zones que j’ai pu traverser. Cependant, je retrouve toujours avec une relative fréquence des restes de tubes ou emballages plastiques contenant une mixture permettant aux cyclistes de puiser l’énergie pour atteindre le sommet. Il faudrait en effet leur donner quelques coup de fouets, comme on peut le retrouver écrit sur certains emballages de produits, afin que ces cyclistes daignent monter leur déchets à la prochaine poubelle : on en retrouve environ tout les 4km pendant l’ascension.

La route est assez fréquentée par les voitures qui montent aussi bien qu’elles descendent. Lorsque je prête attention aux plaques d’immatriculation, je constate qu’à chaque voiture change la nationalité : hollandaise, belge, français, parfois même anglais. Certaines me klaxonnent ou me font des signes d’encouragement. De même que certains cyclistes qui me lèvent le pouce à la descente. Au bout de quelques kilomètres Thierry ne me rattrape plus ; il est 10h, j’approche doucement les 1000m de dénivelé et il commence à faire chaud, j’espère pour lui qu’il va bien. Je finis par jouer au même jeu avec un autre cycliste en VTT muni d’un cadre léger qui me dépasse alors que je me défais de quelques déchets tout en ingurgitant des mirabelles. Je lui en tends une poignée au passage qu’il prend sans s’arrêter en me remerciant vivement. De lourdes côtes au dénivelé important commencent à venir. Peinant dans celles-ci avec son VTT je finis par rattraper notre ami cycliste. Le soleil commence à augmenter la température corporelle, je décide de faire une bonne pause pour m’hydrater et laisser celle-ci redescendre. Le VTT me rattrape, s’arrête avec moi, nous échangeons mirabelles contre barre de céréales. Puis il se remet en route, confiant que je le dépasserai à nouveau. Après m’être badigeonné de crème solaire je reprends la route. Heureusement j’arrive dans une partie plus ombragée par les arbres qui, combinée avec l’orientation du relief et quelques cumulus qui viennent voiler le soleil me permet de gravir les derniers mètres de dénivelé à l’ombre avant que la température baisse suffisamment pour devenir agréable avec l’altitude.
Les derniers kilomètres à 12 % avant le chalet Liotard ne sont pas faciles. Je me résous à mettre pied à terre pour pousser mon engin dans les parties les plus abruptes. Même à pied, avec la charge que je transporte, la chose n’est pas aisée. J’arrive enfin au chalet Liotard, la vue est magnifique mais malheureusement voilée par un brouillard de pollution s’étendant très haut et à perte de vue. Un triste constat de l’état dans lequel nous laissons notre environnement et qui vient aggraver fortement la période de canicule que nous vivons actuellement.

J’hésite à m’arrêter au chalet liotard pour déjeuner. Bien que fatigué, je décide de continuer : il me reste 5 ou 6 kilomètres et je crois alors que le sommet culmine à 1550m comme je l’ai vu écrit quelque part sur un panneau. Le chalet avoisinant les 1400m d’altitude, je repars confiant. La route commence immédiatement par de fortes pentes. Je m’attaque à celles-ci avec le peu d’énergie qu’il me reste, puis je finis par craquer au milieu de la forêt qui, a cet endroit, est très verte. Une jeune Allemande, probablement au vu de l’accent, redescend en poussant son vélo. Elle me demande si je vais bien et me congratule en me disant à plusieurs reprises « respect ». Étourdi par l’effort, je ne peux répondre que par oui et plusieurs fois par merci. Je m’arrête alors pour engloutir une grande partie de mes réserves de nourriture. Le miel que lavande me fait grand bien et après cette bonne pause je reprends la route, revigoré. J’attaque la pente par morceau, la mission d’éboueur que je me suis donné me donne de bons prétextes pour m’arrêter et souffler un peu. Au sortir de la forêt, à 2 kilomètres du sommet que je peux maintenant apercevoir, je m’arrête à une poubelle me défaire des déchets. C’est alors que je croise mon ami en VTT qui redescend du sommet. Il s’arrête, me décrit le relief et le paysage avec un grand sourire, m’offre à boire puisque j’ai terminé mon eau quelques centaines de mètres avant et me redonne des barres de céréales en me disant qu’il sera heureux si cela me permet d’atteindre le sommet.
Un kilomètre plus loin, je m’arrête à nouveau pour profiter du paysage et échange avec un Français, un cinglé du ventoux, qui en est à sa deuxième ascension de la journée par Malaucène après avoir commencé par Bédoin. Il est loin d’être le seul, j’ai échangé quelques minutes avec un étranger aussi cinglé que lui. Les cinglés du Ventoux sont des cyclistes qui se mettent en tête de gravir la Ventoux par les trois versant dans la même journée. Je le suis aussi, mais de par la quantité de charges que je monte. Arrivé au Radiome, un Hollandais me prend en photo, il me congratule, me questionne sur mon vélo et me dit qu’il a tenté l’ascension 6 fois sans que je sache s’il a réussi. J’imagine que oui mais probablement pas la première fois vu la façon dont il le présente.

Je parcours les quelques centaines de mètres me séparant du sommet. C’est avec un grand sourire et le point levé que j’arrive à bout de ce géant de 1910m à 14h. Je demande à un passant de me prendre en photo devant le panneau, puis j’entame la descente : j’apprends que l’eau est payante, je décide que je peux bien supporter de ne pas boire encore un peu, le temps de rejoindre Sault ou je compte m’arrêter. Je découvre finalement que quelques mètres en dessous du col des Tempêtes coule la fontaine de la Grave. Un léger filet coule le long du mur, suffisamment pour emplir ma poche d’eau. Un couple de retraités, probablement, apprécie ma machine. L’homme souhaite se prendre en photo derrière en s’essuyant le front d’un mouchoir faisant mine d’avoir gravi la montagne, une cigarette à la main. Je me m’amuse de la scène. La cigarette faisant désordre, ils réitèrent l’opération !


Je descends la montagne en direction de Sault, c’est un pur bonheur de profiter de cette descente. Une bonne partie de faux plat descendant m’oblige à pédaler un peu. Lorsque j’atteins les 1100m de dénivelé, je commence à sentir le fond de l’air vraiment chaud. J’arrive progressivement sur le plateaux d’Albion où blé lavande et graminées sèches se côtoient sur des teintes violettes, jaunes voire parfois presque oranges. Avec cette chaleur je sens qu’il suffit d’une étincelle pour que tout cela parte en fumée.
J’arrive à Sault et je décide de m’attabler à un petit restaurant pour une bonne limonade et une part de tarte aux pommes. La chaleur est telle que la part de tarte, relativement conséquente, est lourde sur l’estomac. Un cycliste belge souffre durement de celle-ci à tel point qu’il en vomit au pied d’un arbre.
Je reprends ma route jusqu’à Saint-Christol, m’arrêtant pour cueillir quelques brin de millepertuis au milieu d’abeilles assoiffées venues s’abreuver le long du ruisseau presque à sec. Arrivé à Saint-Christol, je suis accueilli par Clément et Lucas qui s’occupent bien de moi en me proposant à boire et une bonne douche. Je leur raconte mon trajet et projet. Une question me taraude toujours : quel est le poids de mon équipement ? Nous prenons une balance, je commence d’abord par me peser, la balance indique alors 70,8kg, puis je me pèse en portant le vélo équipé, la balance indique alors 117kg. Je transporte donc un peu plus de 46kg en plus de mon propre poids là où j’imaginais transporter plutôt 35kg après mes séances gratuites de maçonnerie de la veille et avant veille. Après avoir longuement discuté de mes différentes aventures avec Clément, qui montre un vif intérêt pour l’exploration, nous partageons le repas avec Véro qui finit par rentrer. Je rejoins ensuite le lit qu’on me prête pour la nuit, je travaille à l’élaboration de la carte pour matérialiser les points de passage de mon trajet pour mon blog et je m’endors rapidement.
Une réponse à “Buis-les-Baronnies – Saint-Christol”
Chapeau Fabrice,
Le Ventoux avec 45 kg de bagages, il faut le faire!
De la part d’un cinglé du Ventoux en tandem avec Cathie au début des années 90.
Bonne route
Claude